samedi 30 avril 2011

4ème Séance- 18/03/2011 :Tribus et Castes en Asie du Sud: Perceptions de la « nature » et enjeux environnementaux


Tribus et Castes en Asie du Sud: Perceptions de la « nature » et enjeux environnementaux

L’ethnographie coloniale, convaincue que les tribus étaient les premières peuplades de l’Inde, les ont considérés comme les plus purs représentants des Dravidiens, avant les métissages liés à l'arrivée des peuples indo-européens. Aujourd’hui encore, l’étude des tribus privilégie souvent l’approche biologique, comme en témoignent certains travaux de l' Anthropological Survey of India, dont l’Atlas de 1994 regroupe les tribus en fonction de la taille de leurs crânes ou leur profil. En fait, les tribus sont des groupes organisés selon un système de parenté, qui en se reproduisant dans l’histoire ont certes conservés certains caractères physiques, mais c’est surtout à partir de critères tels  que la langue ou le mode de vie écologique que l’on peut les définir. Toutefois, il faut démystifier l’idée selon laquelle les tribus vivaient en isolat : ont sait aujourd’hui que certains aborigènes , tels les Gonds ou les Bhils, ont participé à la formation comme à la chute de grands empires (Carrin, 1996).

 L'Asie du Sud est composée de 6 Etats : l'Inde, le Bangladesh, le Pakistan, le Népal, le Bhoutan, le Sri-Lanka. Notre étude se concentre sur l'Union Indienne, nation unique et démocratique, où toutes les minorités autochtones ont droit à la reconnaissance et au développement de leur culture tel qu'inscrit dans la constitution indienne de 1950, sur la Protection et les intérêts des minorités : " Tout groupe de citoyen résidant sur le territoire de l'Inde ou sur toute partie de celui-ci et ayant une langue, une écriture ou une culture distinctes aura le droit de les conserver". L'une des devises indiennes est l'"Unité dans la diversité" et les citoyens de l'Inde se considèrent comme les membres de la "plus grande démocratie du monde".I.        Les tribus dans la société indienne 

Recensement de 1991 donne la liste de 400 tribus différentes, regroupant au total plus de 67 millions d’individus, soit 8,1 % de la pop indienne (contre 5,3 en 1951 et 3 % en 1971). Aujourd’hui, plus de la moitié de la population tribale vit encore dans les ceintures forestières et les régions rurales de l’Est et du centre de l’Inde (Bengal occidental, Bihar Madhya Pradesh et Orissa) ; 20% d’entre elles se trouvent dans les Etats de l’Ouest (Gujarat, Rajasthan, Maharashtra) et 6% dans le Sud.
Le Nord-est de l’Inde est également composé d’une part importante de populations classées dans les catégories de tribus.
On peut identifier plusieurs groupes ethnolinguistiques en Inde dont les populations du groupe tibéto-birman au nord-est de l’Inde,  les groupes parlant des langues austroasiatiques, et les groupes du sud de l’Inde, de langue Dravidiennes.

I.1  Comment déterminer les tribus de l'Inde?
a) Les "adivasis", « premiers occupants du sol » - dans le centre de l'Inde
Les tribus de l’Inde se désignent et sont désignées de plusieurs manières selon les régions du sous-continent : 

        "adivasis", formé du terme hindi adi , « commencement » , et vasi, « résident de », signifie littéralement « aborigènes » : les adivasi sont les « premiers occupants du sol ». Cette expression fut forgée dans les années 30 par les leaders des tribus Munda du Bihar et n’est bien sûr pas neutre ; l’affirmation du caractère autochtone des tribus recouvre en effet d’autres éléments du discours adivasis, tels que l’exploitation dont ont été victimes les populations tribales à l’époque coloniale et leurs revendications d’égalité par rapport aux castes hindoues. Dés les années, 1930, des Mundas et des Oraons répandirent l’idée que les populations tribales, an tant que premier occupants du sol, s’opposaient à bon droit aux population hindo-aryennes, les hindous qui , de leur coté sous l’influence des idées brahmaniques, considéraient les adivasis comme des jungli, des « sauvages », ce statut de hors caste revenant souvent les assimiler aux intouchables.Fig. : Répartition des populations tribales en Inde. Source: A social and economic atlas of IndiaDelhiOxford University Press, 1987 (Jaffrelot, 1996).

b) Les tribus tibéto-birmanes et austro-asiatiques du Nord-est de l'Inde
 Dans le Nord-est de l’Inde, la prise de conscience identitaire des tribus a souvent été liée au mouvement protestants évangéliques. Sous l’influence des missionnaires, elles ont peu à peu rejeté le pouvoir traditionnel des chefs et leurs jeux d’influence avec les Britanniques et exprimé un  désir de représentation politique.
c)  Les peuples tibéto-birmans himalayens

I. 2 Les tribus dans une société de castes
I.3 Classifications de la constitution indienne de 1950
De fait, après l’indépendance, l’Assemblée constituante a reconnu la nécessité de classer les tribus dans une catégorie parallèle aux intouchables, sous la désignation  scheduled tribes (qui fait pendant aux scheduled castes), qui s’applique à des populations caractérisées par l'etat comme étant d' "un état de développement inférieur" et auxquels l’Etat accorde certains avantages.

II. Relation entre les tribus et les milieux : perceptions, usages



II.1 Perception des milieux par les tribus


II.2 Usages des milieux et modes de subsistance

 Les modes de subsistance de ces différentes tribus ne sont pas identiques. on peut distinguer: 



 - les chasseurs-ceuilleurs ( Chenchu,  Yanadi, Malapantaram de l’Andhra Pradesh, les Birhor du Bihar…);



- les sociétés pratiquant l'essartage ou le système rotatif de défriche-brûlis (Jena Kurumba, Urali qui habitent la forêt, et les groupes peuplant les collines du Nord-est de l’Inde); 



- les éleveurs transhumant pratiqué principalement par les peuples himalayens; 



- les éleveurs itinérants pratiqué dans les plaines arides du Nord-ouest de l'Inde (tels que les Bhils du Madhya-Pradesh, Rajasthan, Gujarat); 


- les agriculteurs sédentarisés dont certains groupes ont dominé des Etats princiers dans le passé et pratiquent souvent souvent une forme d’agriculture sédentaire ; tel que les Raj Gond ou les Murias de l’Inde centrale, des Apa Tani et des Tanggkul du Nord-est, Khasi du Meghalaya, Santal du Bengal se distinguant par leurs savoirs faire en matière d’irrigation.

Les différents milieux biophysiques auxquels il sont attachés occupent une place considérable dans l’imaginaire des tribus, y compris chez ceux qui l’ont quitté. Le défrichement de nouvelles terres de manière collective reste un souvenir dans le récit et les traditions orales. 
Or, bien des tribus habitant la forêt sont menacés par les lois visant à freiner la déforestation et les privent de leurs terres alors qu’elles pratiquent l’agriciulture sur brûlis ou le travail du bois, comme les pahari de l’Uttar pradesh et les Gond du Madhya Pradesh. 

III. Tribus et enjeux environnementaux
Les groupes tribaux ont, à chaque époques, revendiqués leur identité et leur appartenance à un territoire pour lequel ils menèrent des guerres. Les récits de ces guerres sont contés dans les grandes épopées du Mahabaratha et du Ramayana.
Plus récemment, au cours de l'époque coloniale, en 1922, les Bhils du Rajasthan se soulevèrent et fondèrent leurs propre royaume.

III. 1 Mouvements sociaux des tribaux

Mouvement de Naxalbari et mouvements maoistes 

Joël Cabalion, « Maoïsme et lutte armée en Inde contemporaine », La Vie des idées, 9 mars 2011. ISSN : 2105-3030.

Carte des "districts affectés par le mouvement Naxalite", 2007 source : Wikipédia



A lire : Arundhati Roy "Walking with the Comrades" publiée dans OutlookIndiale 29 mars 2010

Version anglaise (VO)
Version traduite en français



 A écouter: 
Mermet Daniel, « Inde : La dernière Guérilla », in Là-bas si j’y suis, Janvier 2010, URL : http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=1831








II.2 Autonomies territoriales et formation de nouveaux Etats dans l’Union Indienne


Depuis son indépendance, l'Inde a été à la demande de certaines minorités soumise, à une série de réorganisation de sa carte politique qui a dû faire place à de nouveaux Etats linguistiques correspondant à plusieurs communautés ethnolinguistiques, parfois suite à des mouvements insurectionnels.  



Revendications territoriales, Territoires autonomes


En 1962, est créé l'Etat du Nagaland pour les tribus tibéto-birmanes des Naga, et en 1972, la réorganisation du Nord-est créés les Etats de Meghalaya, Mizoram, Arunachal Pradesh pour d'autres tribus tibéto-birmanes ou môn-khmères. 

En 2000, sont créés les Etats du Jarkhand et le Chattisgarh pour les tribus Munda et dravidiennes du Deccan. 

En 2003, un accord donne une autonomie aux Bodo (tibéto-birmans) de l'Assam. 


II.3 Émergence de nouveaux conflits autour des ressources naturelles et des territoires


Mouvements sociaux contre les Zones Economiques Spéciales (ZES)

Conclusion: 

En Inde, le concept de "tribu" est issu d'une perception coloniale de la société. 
Les mouvements de revendications des basses castes et des "tribus" exprime une volonté d'émancipation de populations souvent laissé en marge des bénéfices du développement. 
Une contradiction persiste entre lutte de "classes sociales" revendiqué par les tribus maoïste du centre de l'Inde et lutte "ethnicisé" dans le cadre des mouvements de revendications territoriales. Le droit à l'autodétermination n'implique pas forcément l'idéologie égalitaire de justice sociale et le partage accepté des ressources pour lesquels les Dalits se mobilisent. 



Bibliographie :

Carrin, Marine
1996, « Les tribus de l’Inde : repli identitaire et mouvements insurrectionnels », In : L’Inde Contemporaine de 1950 à nos jours, Chap XIX Fayard, Paris, pp. 421-440

Jaffrelot, Christophe (sous la direction)
2002, Castes et tribus : résistance et autonomie dans la société Indienne, volume 23 de Purusartha, Paris 2002. 
1996, L’Inde Contemporaine de 1950 à nos jours, Fayard, Paris

Haimendorf, 
"Tribes of India" 



Lardinois, Roland
1988, Miroir de l'Inde: Etudes indiennes en sciences sociales, Ed. de la Maison des Sciences de l'Homme Paris, 392p.

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